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Nivôse an CCXXIII

                              Le rire et Les éclats du rire

 

Nivôse 2015 rimerait avec sinistrose ou psychose qu’il nous faudrait nous ressaisir grâce à quelques ouvrages autour de thèmes chers en République française : le rire et la caricature.

 

Au début du deuxième millénaire, la revue Dix-huitième siècle décida de consacrer son numéro annuel de l’an 2000 au rire.

 

Avant de laisser les nombreux auteurs explorer ses éclats suivant  quatre axes de lecture – théâtre et tradition carnavalesque, l’esprit français, le débat philosophique, rire et pouvoir –,  Lise Andries présente un état des recherches en rappelant que la condamnation du rire par l’Eglise – oublieuse à l’époque de Saint-François d’Assise - correspondait à une tendance générale au XVIIe siècle de répression des manifestations du corps.

 

L’historienne différencie notamment plusieurs formes de rire : le « gros rire » de la farce destinée à la « populace », opposé à la raison car excessif et faisant perdre le contrôle de soi, célébrant la dimension animale du corps, ce même rire d’Ancien Régime lié à la fonction de bouffon du roi, disparue à la fin du XVIIe siècle ; le rire sociable, voire mondain, qui est celui des « marques de l’esprit du siècle », traquant le ridicule dans les salons ou au contraire, comme prôné par le philosophe Shaftesbury, le rire de bonne compagnie et de gai savoir, non malveillant mais réhabilitant l’esprit et l’humour, proclamant ainsi le droit de dénoncer les ridicules au nom de la liberté de l’esprit.

 

  

        

 

En 2000, Antoine de Baecque avait aussi publié un essai politique sur La culture des rieurs au XVIIIe siècle, posant d’emblée le postulat que « les Lumières sont un âge du rire » et que « le rire n’est pas seulement un invariant de l’espèce humaine ». La déclinaison en finesse de ces manières mais aussi sujets de rire ravive le destin de personnages emblématiques : qu’il s’agisse du cabaretier Ramponneau ou du marquis de Bièvre, des frelons aristocrates ou de Ginguené, rabelaisien en croisade contre la presse ultra-royaliste, des chevaliers du bel esprit d’un Rivarol ancien protégé de Voltaire, de Cérutti, ex-jésuite tourné vers les villageois, l’auteur remarque que la plaisanterie cesse autour de l’an II.

 

Charles Nodier marque, entre autres, le tournant romantique du nouveau siècle avec la commémoration du Dernier Banquet des Girondins après que Mme de Staël eut annoncé : « Figaro deviendra grave. L’avenir est à la tristesse des lendemains raisonnables».

 

 

Lise Andries (dir.), Dix-huitième siècle, n° 32, 2000 : Le rire. PuF, 2001 (cote BER 2 (32))

 

Antoine de Baecque, Les éclats du rire. La culture des rieurs au XVIIIe siècle. Calmann-Lévy, 2000 (cote 16231)

 

Lire aussi Champfleury, Histoire de la caricature sous la République, l’Empire et la Restauration. (OR383)

 

[janvier 2015]

Allégorie de Nivôse. "Le soleil répond au Capricorne."
Allégorie du mois de Nivôse