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« An premier de la République française le 19 octobre 7 heures de relevée, est comparu par devant la commission de son propre mouvement François Jean Baudouin, imprimeur de la Convention nationale, auquel le président a déclaré qu’il avait été décerné un mandat d’amener et qu’il ait par conséquent à s’expliquer s’il entendit subir interrogatoire et sur sa réponse affirmative l’interrogatoire a eu lieu ainsi que suit :

Interrogé sur son nom, âge et état et demeure

A répondu s’appeler François Jean Baudouin imprimeur de son état demeurant aux cy-devant Capucins St Honoré.

Interrogé s’il connaît un nommé Gilles

A répondu qu’il l’avait connu aux Jacobins avant le 17 juillet 1791 et que depuis cette époque il n’avait eu affaire à lui ni directement ni indirectement.

A lui observé qu’il n’est pas exact dans les faits puisqu’il a été lié d’affaires avec le sieur Gilles et qu’il en avait reçu de l’argent.

A répondu et dénié.

A lui représenté un compte manuscrit de la somme de vingt mille livres acquitté le 29 may 1792 par le sieur Gilles dans lequel il est dit quant aux 10 000 livres du Logographe, il y a 5 000 destiné à le soutenir et les autres 5 000 à éteindre petit à petit, trois créances dont la première au sieur Le Hodey de 60 000 livres, la seconde de 22 000 livre au sieur Beaudouin, la troisième [...]
A répondu n’avoir aucune connaissance de ce fait ni de ce papier.

Interrogé cependant s’il n’est pas vrai qu’il ait été directeur ou intéressé dans l’entreprise du Logographe.

A répondu qu’il était directeur de la partie typographique et intéressé dans l’entreprise pour une somme du Logographe.

Interrogé comment Le Logographe qui avait été fait dans le principe par le sieur le Hodey avait été remis en ses mains et quels étaient ses associés.
A répondu que par un traité en date du 1er octobre 1791 souscrit entre Barnave Alex

La Mothe, Adrien Duport et La Borde dit de Marivelle, et tous ex-députés de l’assemblée constituante, lui Beaudouin et Étienne Le Hodey cy-devant rédacteur et propriétaire de l’entreprise, il s’était établi pour ledit journal entre lesdits députés et lui Beaudouin une société de huit années pour l’exploitation dudit journal et en présence de Le Hodey propriétaire dudit journal qui l’avait vendu aux dits députés. Interrogé quels avaient été les rédacteurs du journal pendant le cour de cette société.

A répondu que le rédacteur depuis le 1er octobre jusqu’au 28 février étaient pour la partie politique Le Hodey, payé 6 000 livres par année, Turin, 2 400 livres, Le Comte 2 400 livres. Partie littéraire Guingenné 9 000 livres, et ce citoyen à [illisible] renvoyé depuis par les 4 ex députés propriétaires Plongeon son « Const. » 1 200 livres par an. Politique étrangère S. pour 3 000 livres ; politique intérieure 2 400. Traduction de papiers anglais Lepidore [?] frère 2 400. Théâtre : Lemière neveu 1 200 livres Le Fèvre 400 livres et Daillau 800 livres. Variété Corbigny 1 200 livres. Frais de bureau 1 200 livres.

Interrogé s’il connaît le rédacteur depuis le 28 février 92.

A répondu que la partie politique était rédigée par Ducos de Bordeaux (qui n’est pas le député) Le Comte déjà nommé. Pour la partie du théâtre Lumière neveu également nommé et Marialla ce dernier à l’époque du 20 avril environ quitta cette rédaction pour être le secrétaire de duc Daranbère et sa place fut donnée pour Pélingue demeurant hôtel Chareau rue du Fbg Saint-Honoré qui à l’époque du 28 février avait été chargé de la surintendance de cette partie par le propriétaire ex député et Mr Desouches.

Observe le répondant que Pélingue ne paraissait retirer aucun émolument de cette surintendance, et qu’il ne lui a jamais donné à cet effet aucune somme mais qu’il a toujours montré pour cette entreprise le plus grand intérêt.

Interrogé si l’entreprise du Logographe n’était pas liée à celle de L’Indicateur.

A répondu que non, qu’elle était si peu liée à L’Indicateur que ce journal avait été placé à [illisible] de lui répondant dans la maison cy-devant occupée par Le Logographe ; que les numéros de ce journal furent répandus dans le public sans que ni lui répondant, ni Le Hodey cy devant propriétaire et tous deux locataires de ladite maison en sussent absolument rien. Le répondant déclare que la lecture du dernier numéro de ce journal véritablement contre-révolutionnaire, l’a saisi d’une telle indignation qu’il se transporta à l’instant dans la maison rue des Bons Enfants et qu’il voulut faire jetter l’imprimeur par la fenêtre ; que les ouvriers de cette imprimerie l’adressèrent à un nommé Jobert demeurant hôtel de Valois rue de Richelieu ainsi que le répondant croit s’en souvenir et qu’il a appris depuis avoir été médecin à Arles. Que le répondant se transportant sur le champ chez le sieur Jobert logé au 4e dans l’hôtel cy dessus dénommé. Que la visite du répondant ne parut pas du tout faire plaisir au sieur Jobert qui s’apperçut bientôt de l’imprudence d’Adrien Duport qui avait constitué lui Jobert rédacteur en chef de L’Indicateur ; qu’au surplus ledit Jobert déclara sur la demande que lui fit le répondant d’exhiber son traité avec Duport, qu’il allait chez ledit Adrien Duport et que sous une heure pour tout délai ledit répondant aurait réponse satisfaisante. Qu’effectivement quelques heures après Adrien Duport écrivit une lettre au répondant pour se justifier d’avoir sous-loué à l’instant et sans la participation du répondant la maison de la rue des Bons Enfants [il s’agit probablement de la lettre jointe mentionnée au début].

Et pour constater la vérité de la déclaration le répondant a prié le Président de recevoir lesdites lettres pour être annexées au procès verbal lesquelles lettres ont été paraphées ne varietur.

Et attendu l’heure tarde [tardive ?], le présent interrogatoire a été renvoyé à demain et lecture faite de l’interrogatoire ledit Beaudouin y a [approuvé ?] et a signé avec nous au bas de tous les passages.

Signature sans les trois point, avec un accent [Baudoùin]


Ce jourdhuy 28 octobre 1792, le sieur Baudouin s’étant présenté devant la commission, avons continué son interrogatoire ainsi qu’il suit.

Interrogé si quelqu’un des associés à l’entreprise du Logographe ne lui a pas proposé la rétrocession de son intérêt dans cette entreprise.

A répondu que dans le courant d’avril dernier, il a été proposé à La Borde de Méreville de céder à un tiers dont jamais le répondant n’a eu le nom, l’entreprise du Logographe moyennant 120 000 livres. Ce à quoi le répondant l’a vivement exhorté mais qu’il ne lui a jamais été fait de proposition de se charger personnellement de la propriété de cet ouvrage qu’il regrettait déjà d’avoir entrepris, que cependant dans ce temps Pélingue avait fait différentes calendriers pour voir si l’entreprise ne pourrait pas être avantageusement continuée, et Pélingue a donné à entendre à La Borde père qui refusait d’abord de payer, qu’il était disposé de se charger seul avec le répondant dudit journal, qu’il espérait par ses soins reprendre de plus en plus, mais le répondant n’a donné aucun assentiment à cette proposition, qu’il s’est réservé d’examiner, ce qui n’a eu aucune suite, qu’au surplus [?] il n’a été proposé au répondant, par aucun des associés, la sécession de son intérêt personnel dans cette entreprise.

Interrogé s’il n’a proposé à aucun des associés une part de 5 000 livres pour se charger de la part qu’avaient ses associés dans cette entreprise.

A répondu que non ainsi que le prouve sa correspondance et la procédure intentée par lui répondant contre tous les associés à cette entreprise.

Interrogé s’il ne lui a pas été proposé avec Le Hodey d’être le prête-nom de cette entreprise dont la Liste civile aurait fait les frais.

A répondu que non, et ajouté que si cette proposition lui eut été faite, il l’aurait dénoncé à l’assemblée nationale.

Nous plaçons sous les yeux du répondant une lettre non signée, ni datée, trouvée dans les papiers relatifs à Adrien Duport, dont la liasse a été remise sur le bureau de la Commission par les membres du comité de surveillance et a été renfermée sous les scellés de la Commission et sous la cote et avons interpellé le répondant de déclarer s’il reconnaît l’écriture de cette lettre, et s’il sait à qui elle était adressée.

A répondu qu’il reconnaît la lettre pour avoir été écrite par Adrien Duport, l’un des associés, et qu’il soupçonne qu’elle était adressée à Laborde de Méreville, autre associé.

Avons invité le répondant de prendre connaissance du contenu de cette lettre et de nous déclarer s’il a quelque connaissance des faits qui s’y rapportent.

A répondu après avoir pris lecture de cette lettre qu’il a connaissance des faits qui y sont rappelés à l’exception de celui relatif au projet de faire acheter l’entreprise par la liste civile, sous le nom du répondant ou sous celui de Le Hodey, ce projet d’autant plus absurde que l’acte de société s’y opposait formellement, n’a jamais été confié au répondant à l’égard de la perte de cinq mille livres dont il est fait mention dans cette lettre, elle a été effectivement demandée par le répondant à Adrien Duport, non pour obtenir la rétrocession de son intérêt dans l’entreprise, mais parce que cette somme formait le cinquième de la charge de Duport dans la perte éprouvée par la société depuis le 1er octobre 1790.

Le répondant a produit à l’appui de cette explication deux lettres qui ont été à l’instant cotées 1 et 2 et paraphées tant par le citoyen Grand que par l’un des secrétaires que par le répondant.

La lettre indiquée par le répondant être d’Adrien Duport a été également cotée AA et paraphée tant par le dit citoyen Grandpré que par ledit citoyen répondant.
Ces trois lettres ont été à l’instant annexées au présent procès-verbal.

Le répondant a demandé d’ajouter pour sa justification qu’il est d’autant plus faux qu’il ait jamais prétendu se charger d’aucune portion de ses associés dans l’intérêt de l’entreprise du Logographe, ni qu’il ait voulu prêter son nom à la vente qui en aurait pu être faite à la liste civile qu’il a été prêt de céder à Adrien Duport, à l’époque du mois de mai dernier, l’intérêt personnel que lui répondant y avait et pour prouver cette assertion le répondant nous a invités à joindre au présent procès-verbal différentes pièces qui ont été extraites sur son indication d’un paquet scellé par la section des Tuileries, déposés les sceaux étant entiers sur le bureau de la Commission, lequel paquet le répondant nous a déclaré avoir été formé de la collection des pièces qu’il contient et scellés au moment où il a appris être impliqué dans une déclaration faite à la barre de la Convention par les membres du comité de surveillance de la Commune qu’il existait des papiers relatifs à la distribution de la liste civile où le nom du répondant se trouvait porté.

Les dites pièces au nombre de vingt auront été renfermées en une liasse cotée B et les dites pièces cotées par première et dernière et paraphées tant pour ledit citoyen Grandpré que par le déclarant.

Lecture faite au citoyen Baudouin de ses réponses au présent interrogatoire, il a déclaré y persister et a signé tant à la clôture qu’au bas de toutes les pages avec le citoyen Grandpré et [illisible] Garnerin secrétaire nommé pour la transcription du présent interrogatoire.

Vu par la commission le procès verbal des interrogatoires faits au citoyen François Jean Baudouin, imprimeur de la Convention nationale, prévenu d’avoir reçu des sommes de la liste civile les [illisible] et les pièces à l’appui.

La commission déclare qu’au moyen des pièces produites par ledit citoyen Baudouin et des explications qu’il a données, il y a lieu à aucune inculpation contre lui relativement à l’objet qui avait déterminé le mandat d’amener décerné par la commission, et dont il a prévenu l’exécution par la comparution volontaire. »

Signé : Denizey, Dufriche Valazé

Autre écriture : « La surcharge du mot six approuvée. Vu par la commission le procès verbal des interrogatoires faits au citoyen François Jean Baudouin, Imprimeur de la Convention nationale, prévenu d’avoir reçu des sommes de la liste civile, ensemble les [ill] et les pièces à l’appui. La commission a acquitté ledit citoyen Baudouin de toutes poursuites relatives à l’objet qui avait déterminé le mandat d’amener contre lui [texte barré sur l’original]. Déclare qu’au moyen des pièces produites par ledit citoyen Baudouin et des explications qu’il a données, il n’y a lieu à aucune inculpation contre luy relativement à l’objet qui avait déterminé le mandat d’amener décerné par la commission, et dont il a prévenu l’exécution par sa comparution volontaire. »

Signé : Denizey, Dufriche Valazé.

 

Mot manuscrit attaché :

Déclare qu’au moyen des pièces produites par ledit Baudouin et des explications qu’il a données, il n’y a lieu à aucune inculpation.

Fait à Paris au lieu des séances de la Commission des 24 de la Convention nationale, le 28 octobre 1792 l’an IIe de la République.

Signé : Denuzey, Delsol, Drouet, Laurencot, Lesage, Valazet

Commission extraordinaire des Vingt-Quatre établie par le décret du 1er octobre [1792], De l’imprimerie nationale

Vu par la Commission le procès-verbal des interrogatoires faits au citoyen François-Jean Baudouin, imprimeur de la Convention Nationale, prévenu d’avoir reçu des sommes de la liste civile ; ensemble ses réponses et pièces à l’appui.

La Commission déclare qu’au moyen des pièces produites par ledit citoyen Baudouin, et des explications qu’il a données, il n’y a lieu à aucune inculpation contre lui relativement à l’objet qui avait déterminé le mandat d’amener décerné par la Commission, et dont il a prévenu l’exécution par sa comparution volontaire.

Fait à Paris au lieu ordinaire des séances de la Commission, le 28 octobre, l’an premier de la République française.

Signé à l’original : Delbrel, Dereazey, Laurencot, Lesage, Valazet et Poullain grand-pré, secrétaire.

Pour copie conforme à l’original, Poullain grand-pré secrétaire.

Commune de Paris, le 16 novembre 1792, l’an premier de la République

Nous, administrateurs au département de police et de salut public, membres du conseil de la Commune de Paris, déclarons que nous avons assisté à l’interrogatoire subi par le citoyen François-Jean Baudouin, imprimeur de la Convention nationale, devant les commissaires de la Commission des Vingt-Quatre de la Convention nationale, et que nous reconnaissons, d’après cet interrogatoire et les pièces déposées par lui, il n’y a aucun lieu de le soupçonner d’avoir reçu des sommes de ladite liste civile, ainsi que la pièce contenant le reçu de Giles pour le Logographe, que nous avons lue à la barre, paraissait le faire croire, et lui avons donné le présent certificat pour lui servir à valoir ce que de raison.

À la mairie, les jours et an que dessus.

Signés : Dourdil, Dussort, Lenfant, Leclerc

Ces deux dernières pièces provenant de la collection Crooker de la British Library, cote R 172 (3).

 

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